On me demande souvent pourquoi les acteurs majeurs de la GED et du travail collaboratif « générique » ne sont pas ou très peu présents dans le monde de la construction. A mon sens, cela tient au fait que ce marché reste un marché de niche, avec dans le même temps une complexité assez grande dans les outils et leur mise en oeuvre.
Au démarrage historique des « armoires à plans », à la fin des années 80, les offreurs pensaient que ces technologies se déploieraient rapidement sur les grandes opérations. Au début du XXI siècle, les nouveaux entrants profitant de la bulle internet se réjouissaient du faible taux d’informatisation des entreprises du BTP, et anticipaient sur une généralisation de la pratique des outils de travail collaboratif sur les projets et dans les organisations.
Ce qu’on constate en fait, c’est que même si les projets utilisant les outils de travail collaboratif sont plus nombreux, leur prix ayant chuté ces dernières années, le marché croit lentement en valeur. L’offre, même si elle a tendance à se simplifier, demande un minimum de rigueur dans la gestion du projet ; et bien que chacun proteste de sa bonne foi, le suivi de procédures simples demande un effort qui n’est pas toujours au rendez-vous. Enfin, le cycle de vente des outils est relativement long, rarement moins de douze mois, plus souvent dix-huit, voire plusieurs années entre le premier contact et la commande. Plusieurs raisons à cela : les incertitudes qui pèsent sur la réalisation même des projets, la multiplicité des acteurs auxquels il faut arracher un consensus, le manque d’appétence du monde de la construction. Ce sont souvent les opérations publiques qui sont en pointe sur l’utilisation de ces outils, plus que les opérations privées ; entre un hôpital et un tramway et une opération de bureaux, on voit bien la différence en termes de complexité.
Un marché à croissance modérée, des clients difficiles, un cycle de vente long et complexe : voici autant de bonnes raisons de ne pas y toucher pour les majors.
Tant mieux pour nous !